2022 : une année faste pour le marché de l’art ?
Avec le retour des grandes foires d’art contemporain, la tenue de ventes aux enchères exceptionnelles ou encore un nouvel engouement autour des NFT et du métavers, le marché de l’art a affiché, cette année, une forme olympique. Malgré un contexte socio-économique incertain et la guerre en Ukraine, les œuvres sont même devenues des valeurs refuges, attirant les collectionneurs. Alors que 2023 pointe le bout de son nez, retour sur une année hors norme, marquée par une série de records.
Après une chute des ventes d’œuvres d’art liée à la crise sanitaire en 2020 et un rebond en 2021, le marché de l’art a poursuivi sa remontée en 2022, pour retrouver – et même dépasser – son niveau de 2019. Cette année, il a ainsi affiché une santé de fer, boosté par l’euphorie partagée des collectionneurs, qui ont profité du retour des grandes foires en présentiel, et les résultats records de certaines ventes aux enchères, qui ont émaillé toute l’année. Comme l’atteste le rapport annuel « The Art Market 2022 » de Art Basel & UBS, cette année, le marché de l’art a généré un chiffre d’affaires de 65,1 milliards de dollars. Et pas plus tard que le 19 décembre, les maisons de vente Christie’s et Sotheby’s annonçaient avoir connue une année record, toutes ventes confondues.
Il faut dire qu’en dehors des années 2018 et 2020, depuis 2010, les ventes aux enchères artistiques sont en hausse chaque année. Mais l’année 2022 a été jalonnée de moments historiques, parmi lesquels la vente, par Sotheby’s, de la collection de Harry Macklowe, puis celle par Christie’s, de la collection de Paul Allen, le cofondateur de Microsoft. Organisée en mai, la première, qui comprenait 64 lots, dont des œuvres signées Mark Rothko, Gerhard Richter, Andy Warhol, Jackson Pollock ou encore Jean Dubuffet, a totalisé 922,2 millions de dollars, détrônant le précèdent record mondial détenu par Christie’s lors de la vente, en 2018, pour 835,1 millions de dollars, des 1500 œuvres de la collection Rockefeller. Seulement six mois plus tard, Christie’s récupérait d’ailleurs ce record avec la vente, les 9 et 10 novembre, de 155 lots retraçant cinq-cent ans d’histoire de l’art, parmi lesquels des chefs d’œuvre de Sandro Botticelli, Georges Seurat, Paul Cézanne, Gustav Klimt ou encore Vincent Van Gogh, pour un résultat incroyable de 1,6 milliard de dollars. L’année 2022 détient ainsi un double record de la collection la plus chère jamais vendue, tandis que trois des dix plus grosses enchères de tous les temps se sont également tenues ces douze derniers mois.
Par ailleurs, selon l’AFP, au total cette année, cinquante-deux œuvres ont été adjugées pour plus de 30 millions de dollars ; le précédent record, établi à trente-six œuvres, remontant à 2015. Vingt-quatre œuvres ont quant à elles dépassé les 50 millions de dollars, soit neuf de plus que le dernier record, datant de 2014. Et enfin, la barre des 100 millions de dollars a été franchie six fois en 2022, alors qu’elle ne l’avait jamais été plus de trois fois la même année. Adjugé 195 millions de dollars le 9 mai, à New York, le portrait de Marilyn Monroe par Andy Warhol Shot Sage Blue Marilyn, issu de la collection Ammann, est ainsi devenu l’œuvre du XXème siècle du la plus chère jamais vendue aux enchères. Des résultats exceptionnels qui inquiètent cependant certains musées, qui craignent parfois de ne plus pouvoir rivaliser, alors que de telles sommes d’adjudication font également grimper les prix des assurances.
Outre les ventes aux enchères, les foires ont par ailleurs permis à l’art très contemporain et aux femmes artistes de tirer leur épingle du jeu, comme le soulignait le 8 décembre un article du journal suisse Le Temps. Sans oublier le fait que 2022 a été marquée par un engouement sans précédent autour des NFT et du métavers, certes atténué à la fin de l’année avec l’effondrement de certaines cryptomonnaies. L’artiste numérique américain Beeple est ainsi devenu l’artiste vivant le plus cher au monde, suite à la vente par Christie’s, en mars 2021, d’un de ses NFT pour la modique somme de 69,3 millions de dollars.
Malgré le déclenchement de la guerre en Ukraine, la forte hausse des prix de l’énergie, la montée de l’inflation, la bulle spéculative qui enveloppe le marché de l’art n’a donc toujours pas explosé, en témoignent ces excellents résultats. Face aux crises, le marché de l’art affiche même une résilience insolente, et devient une valeur refuge : les acheteurs y percevant un moyen de diversifier leurs actifs et faire fructifier leurs investissements avec le temps.